Lemon, un zeste

Publié le par Run

On marche entre les rangs, des fruits au sol, des fleurs étoilés blanches pointent leur nez, la grande saison des agrumes approchent. Ici c’est San Giulan’ (en Corse les fins de mots, on les oublie), une bourgade entre Bastia et Porto Vecchio, côte est, dite de la grande plaine. On y cultive un peu tout (avocats, noisettes, vigne), mais les agrumes sont chez eux. Enfin presque, puisque l'aire d’origine est le sud-est asiatique, mais au gré des voyages exploratoires, du commerce, ils se sont étendus entre les deux 40ème parallèles du globe ce qui pour le néophyte peut correspondre entre Madrid  au nord et Buenos Aires au sud. Ainsi, c’est au Moyen-Age, à partir du XIe siècle, que les commerçants Génois et Portugais introduisirent dans le bassin méditerranéen le pamplemoussier, le citronnier et l’oranger. Et on s'en délecte encore. On pourrait se dire que l'on est auto suffisant et qu'il n'y pas de raisons d'en importer. Mais le consommateur est con, à moins que ce soit aussi le commerçant qui pense vouloir lui faire plaisir, quoi qu'il en soit, en me promenant dans un Carrefour à Propriano, je tombe sur des citrons...d'Afrique du sud. Quelle honte. Comme si on ne pouvait pas attendre quelques mois. Le pire c'est que dans ce Carrefour, il n'y avait aucun légume ni fruit de Corse. Les tomates venaient d'Espagne, les avocats du Chili et les kiwis de NZ. Comment ces gens ne sont pas poursuivis?

1. Pleine production avant la vente aux pépiniéristes 2. Une belle rangée de Conbawa
1. Pleine production avant la vente aux pépiniéristes 2. Une belle rangée de Conbawa

1. Pleine production avant la vente aux pépiniéristes 2. Une belle rangée de Conbawa

Ici au centre Inrae-Cirad-Areflec de San Giulian’, on produit les greffons, les porte greffes, puis on cultive les agrumes, on les croise, on les déguste et on évalue la pertinence de lancer de nouvelles variétés, qui le pomelo de Corse (qui doit son existence à la rencontre fortuite dans les Caraïbes entre un pamplemoussier et un oranger), qui la clémentine, qui la mandarine. D’ailleurs cette dernière, tiendrait son nom à sa couleur qui rappelle celle de la robe de soie des hauts fonctionnaires de l’Empire du Milieu (Chine), les fameux mandarins. CQFD.
Le genre (genre est la classification que l’on donne aux être vivants, chez nous c’est Homo, et chez le cochon c'est Sus, comme pour l'Abbé Pierre) Citrus est le plus répandu chez les agrumes, on y trouve les citrons, les oranges, les cédrats, pamplemousses, clémentines, etc. Moi à San Giulian', je n'ai pas pu visiter la collection nationale d'agrumes car le gars était pas là (il parait qu'il y a un sacré absentéisme, mais cela ne nous regarde pas), alors j'ai vu une annexe. Mais ce n'est que reculer pour mieux sauter, car je compte revenir.
3. En ce début d'automne, les arbouses éclaboussent par leur rougeur

3. En ce début d'automne, les arbouses éclaboussent par leur rougeur

Après San Giulian', je suis allé sur la côte ouest en passant par Bavella et son fameux col. Et si il y a un truc qui ne passe pas inaperçu dans les virages sinueux, ce sont les cochons noirs qui broutent en bord de route. Ils sont la source de la charcuterie Corse, car ce sont des porcs insulaires "variété Nustrale". Du fait de leur génétique, leur croissance est lente. Les porcs nés au printemps auront une croissance de 18 mois en général, contre 16 à 24 mois pour ceux nés à l’automne. Autre particularité, le gras du porc Nustrale : c’est au cours de la dernière phase de son élevage que le cochon fabrique son gras si spécifique car il s’alimente de glands et châtaignes. Ainsi, ces fruits vont donner un goût à son gras ; à la fin de la vie du cochon, celui-ci viendra constituer une épaisseur de 3 à 6 cm. Ben, mon cochon. Mais nul n'est dupe, car vu le nombre de lonz', copp', figatell' et autre saucissons vendus en Corse, tout ne vient pas des cochons semi-sauvages des montagnes...mais je n'en dirai pas plus, car je tiens à la vie. Pace salute.

So far, so good

4. Le fameux saucisson enveloppé dans une feuille de fougère commence son affinage très tôt 5. Qui passe commande?
4. Le fameux saucisson enveloppé dans une feuille de fougère commence son affinage très tôt 5. Qui passe commande?

4. Le fameux saucisson enveloppé dans une feuille de fougère commence son affinage très tôt 5. Qui passe commande?

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L
en ce qui concerne les fruits et légumes du bout du monde, ici aussi on trouve déjà des clémentines et des oranges mais toutes d'Afrique du sud, mais en principe pas de demande pas d'offre et j'observe... peu de gens regardent la provenance...Pour la charcuterie faut pas trop rêver, celle qui vient des cochons sauvages ils la garde pour eux.Quand même on voit des cochons sauvages mais pas suffisamment pour ce qui est vendu. Mais c'est pareil peu de gens s'en soucient et la plupart préfèrent se faire arnaquer. Moi j'ai surtout adoré voir les cochons au bord des routes, j'ai même réussi à en toucher un.
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D
San Giulian', ...C'est vrai qu'il y a de l'absentéisme, mais il faut connaitre l’envers du décor... Ce Jardin est une pépite : la plus grande collection de citrus en Europe, et elle est très bien placée dans le monde (je ne connais pas sa place exacte). C'est une collection dynamique. Mon copain Yann, et quelques passionnés y fait tous les ans des croisements pour améliorer les variétés, augmenter leurs résistances. Ils ont plus de 2000 arbres uniques à suivre et entretenir... et pour ça, l'état se fend d'une dizaines de poste au maximum. Et c'est comme ça que des collègues chercheurs et ingénieurs se retrouvent à aller passer la tondeuse sous les arbres, tailler comme des fous ET assurer leur devoir de gens de laboratoire. Ils ne ménagent pas leur peine, mais la tache est immense. De loin, du coup, ça parait parfois un peu brouillon, un peu "désert", mais vu se qu'encaissent les copains, ça ne m'étonne pas qu'il y ait un peu d'absentéisme... C'est comme ça, nos institut de recherchent détiennent un patrimoine de fou, de collection unique, mais pas de moyen pour les conserver... on préfère miser sur la tech, les tesla, la crypto-économies... et un jour on s'apercevra que le pognon... ben ça se bouffe pas ! Et là, ben on pleurera sur nos arbres mort... ça fait longtemps que bon nombre de chercheurs INRAE/CIRAD pleurent sur leurs collections qui meurent doucement (légumineuses, arbres fruitiers, souche de bacteries, champignons...) , tels les chevaliers cathare au bord de l'autoroute... N'oublions pas de nous indigner aurait dit Stéphane Hessel. J'espère que tu pourras la visiter effectivement, c'est une pure merveille.
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F
Comme le dit si bien Karadoc : "Le gras, c'est la Vie !!!!"<br /> Merci pour cette jolie déambulation en terre Corse, Cugino Mio<br /> Baci<br /> Stat' Buon'
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