La cuisine est grande, et les mets sont les prophètes
Vous n’allez pas échapper à la page culinaire de ce voyage, voire même à deux pages. Tout d’abord, ce pays est à 80% musulman mais avec une pratique tempérée de la religion de par son passé soviétique, puisqu'indépendant que depuis 24 ans. Ce qui veut dire, que vin, bière et autre vodka sont appréciés. Je vois ici un islam différent de ce que l’on vient nous vendre ailleurs, cela fait-il des ouzbeks des personnes moins croyantes? ma réponse est non. Cependant en plein centre de Samarcande, il y avait une fabrique de vodka. Comme ça faisait tache d’huile aux milieux des mosquées, alors hop on a rasé, et on y a mis un grand parc tout neuf. Est ce la religion qui a mené à cette décision ou bien l’envie d’éliminer une trace de l’ancien colonisateur? Je n’ai pas de réponse.
Malgré cette possibilité de boire de l’alcool, on boit quand même du thé partout, du vert ou du noir, dans des petits bols en céramique. La cérémonie du thé a son importance. On reverse trois fois dans le pot avant de se servir. Le premier étanche la soif, le second isole du froid et du danger, le troisième éteint le feu. Une particularité que je ne comprenais pas : les tasses ne sont jamais remplies, car si c'était le cas, ça signifierait qu’il est temps, pour l’invité, de partir. Car ici, on boit le thé pour partager.
Ensuite vient la cérémonie du pain. Un pain délicieux qui varie avec les régions. Souvent un pain circulaire comme un royaume aplati en son centre qui lui même présente des ornementations qui surement varient avec le boulanger. Le pain s’achète, comme tout ici, en bord de route. On est dans le concept du grand bazar permanent ou l’étal du boulanger jouxte celui du vendeur de pastèques et melons, puis celui du vendeur de boissons qui a son frigo relié au groupe électrogène. Tout s’achète simplement. On est en orient.
On commence son repas en rompant la miche et en l'offrant aux autres, et la fin du repas doit se solder toujours par deux petits morceaux de pain avalés. Entre les deux, j’ai gouté à des choses étonnantes, comme le shomsa, une sorte de soufflé individuel carré renfermant viande de bœuf et oignons. C’est très chaud, et ça cuit collé verticalement dans un chaudron en terre cuite et en paille. Au delà des plats, je ressent aussi que manger est un moment de convivialité et de relaxation. On trouve très peu de tables (sauf dans les grandes villes), mais plutôt des lits surélevés, et les convives s’allongent pour manger. Holbein aurait aimé.
Histoire d'entrevoir ce que Marco Polo a pu ramener de son périple asiatique, il y a ce plat appelé laghman, qui est une soupe agrémentée de longues nouilles et de morceaux de bœuf. Quand Marco arriva en Asie centrale, après avoir pas mal acheté de t-shirt qui venait déjà tous de Chine, il est tombé sur le laghman:
-Hé les gars vous avez vu la soupe?
-Ben chef, y'a des oignons et des tomates, rien de bien neuf...
-Bande d'ignares, regardez dessous, y'a un long ver solitaire blanc, si on ramène ça en Europe, on fait un malheur
-Vous êtes trop fort chef.
Et c'est ainsi que naquit la pasta. Bon dans toute l'Asie centrale, la soupe est une institution et je ne l'ai jamais goutée sans des morceaux de légumes ou de viande dedans. J’ai eu le malheur de dire que c’était du Borsch, fameuse soupe russe, et de m’entendre répondre que ça n’avait rien à voir car il n’y avait pas de chou. Dont acte.
Autre plat national, le Pilaf, ou riz cuit avec carottes finement tranchées, quasiment méconnaissables dans le plat, de l’oignon, des petits raisins pas trop sucrés et des lamelles de bœuf. Le tout cuit dans un mélange d’huile de lin et de coton. C’est délicieux, même si un peu gras. Le riz est cultivé dans l’ouest, et donc encore un produit local.
Je n’ai fait qu’entrevoir cette cuisine aux saveurs multiples. Je viens ici pour la première fois. En 2016, on envisage un voyage de dix jours, histoire d’entrer dans les maisons et de sentir l’odeur du curcuma et du safran.
So far, so good