Le vélo de Ghislain Lambert

Parfois les pingouins trébuchent sur la banquise et tout le monde s'en fout. Il faisait pourtant grand bleu, petite brise, mais pas trop, une bonne pêche s'annonçait car le courant sud pacifique amenait la friture, mais bon on a beau avoir les éléments avec soi, si on a pas de bol, on a pas de bol. Pour moi ce samedi 11 janvier, j'étais un peu un pingouin sur un vélo. Plus comme un Poulidor que comme un Froome, je m'installe, dossard 588, en queue de peloton de cette course de vélo qui a lieu en marge du championnat Elite national de NZ. Je m'installe et pourtant je sens que je serai dernier: vélo le plus pourri des 90 suce roues, en aluminium rouillé polishé, gourdes remplies au gibolin frelaté, pas de pédales automatiques (le seul), pas épilé des guiboles, bref le gars sorti du bois et qui a vu de la lumière.

Top départ pour 4 tours d'un total de 58km. Deux virages à peine négociés, qu'il y'a un type qui pète sa chaine, et là je sais que je ne serai pas dernier. Dieu existe pour les pingouins. Le 1er tour de 13 bornes sur du plat, bien placé en queue avec un groupe de 8, on avance avec des pointes à 45. Au 2eme tour, et malgré un vent de face terrible, je prends le relais, pas fatigué Jean-Pierre. Grand plateau 3ème pignon, et je creuse un trou dans une petite côte, les 8 sont semés, puis me rejoignent dans la descente. ok, suis pas un descendeur.comme à ski diraient certains.

Je négocie les deux premiers tours à 33 de moyenne. Puis s'ensuivent les deux derniers tours (encore 32 bornes), avec deux énormes côtes (pente à 14,5% sur 1,5km). Disons le de suite, la côte c'est mon truc, et pas que la côte de Nuits, j'attaque au pied du mur, et j'arrive seul en haut; le pingouin bombe le torse. S'en suit une grosse descente, suis debout sur les freins, et arrive ce qui arrive quasiment jamais sur route, je crève. Run la loose au pays des kiwis. Je les regarde alors me redoubler. Une mamie Nova me porte assistance et pendant que je change la chambre, elle tient mon vélo. merci mamie. Au moment de regonfler, je m'aperçois que j'avais la mauvaise pompe. Double effet kiss cool. j'hèle un cycliste pour qu'il me prête sa pompe, puis je repars avec au moins 10mn dans la vue. Suis seul face au vent pour tenter de remonter des concurrents, au moins un ça serait sympa. Il reste 1 tour et demi. Franchement là, j'étais sur d'être dernier. J'en double une...puis au passage de la ligne, le vainqueur de l’épreuve me double et finit la course sous les applaudissements. Moi, j'arrive virtuellement 2eme, mais je repars pour mon dernier tour. Au pied de la fameuse côte, je retrouve un coureur que je redouble, puis ensuite on fait la course ensemble jusqu'à l'arrivée, mais j’accélère pour encore gagner une place, j'ai ma fierté. Je finis 83 sur 88, en 1h57'52 (le premier en 1h25), car en fait je n'étais pas le dernier après ma crevaison. Des fois on est pessimistes quand même. Pour conclure en fanfare, je suis le 1er français et donc 1er Montpelliérain, et rien que ça c'est bien cool. Finalement, pingouin qui trébuche n'est pas forcément malheureux.

So far, so good.